Créer de la solidarité, c’est l’essence même de l’assurance. Tout comme la protection sociale, l’assurance est un levier majeur pour réduire les vulnérabilités et les pauvretés. Pourtant, 75 % de la population mondiale n’est pas assurée. L’assurance inclusive apporte une réponse… Celle d’u outil de résilience face aux chocs de la vie.
Patrick Lelong.
Voici de quoi détruire l’idée reçue selon laquelle, pour s’assurer, mieux vaut être jeune, riche et en bonne santé. C’est ce que démontre magistralement et conjointement la fondation reconnue d’utilité publique Entrepreneurs de la Cité – leader de la micro-assurance pour entreprendre – et l’ouvrage de Marc Nabeth L’assurance inclusive (Éditions Argus de l’assurance). Loin d’être « un geste de bonne conscience », l’assurance inclusive répond à un vrai besoin, celui des créateurs, micro-entrepreneurs d’entreprises, fragilisés parce que pas ou mal assurés. Les assureurs ont bien perçu la nécessité d’apporter des solutions comme en témoigne l’implication les partenaires d’Entrepreneurs de la Cité que sont, en particulier, April, AG2R La Mondiale, Axeria, CFDP, CNP Assurances, Hiscox, Polyexpert et Viasanté.
« La fondation entend mobiliser l’ensemble des parties prenantes autrement dit, les pouvoirs publics, les assureurs, les distributeurs pour développer des solutions d’assurances innovantes adaptées et accompagner avec attention et humanité ceux d’entre nous qui sont ou seront peut être les plus touchés par les chocs systémiques présents et à venir » explique Claire Benisti, déléguée générale d’Entrepreneurs de la Cité. D’ailleurs, le secteur de l’assurance a souvent su saisir l’occasion de grands sinistres comme la catastrophe de l’usine AZF de 2001 ou encore plus récemment la pandémie de la Covid 19 pour engager des transformations profondes et ainsi réaffirmer le rôle crucial d’un filet de sécurité et de solidarité assuranciel, notamment pour les plus fragiles.
De qui parlons-nous ?
En France, la micro-assurance s’adresse aux entrepreneurs, demandeurs d’emploi de longue durée, bénéficiaires de minima sociaux qui restent vulnérables en raison de leur faible capacité financière et plus globalement aux ménages modestes et « classes moyennes » fragilisées par des crises. Selon la Caisse des Dépôts, ce sont chaque année 30 000 créateurs d’entreprises vulnérables qui pourraient avoir recours à la micro-assurance. Rendons à César ce qui ne lui appartient pas et à Bruno Rousset, l’ancien PDG d’April, l’initiative du projet d’Entrepreneurs de la Cité. Il s’est engagé dans le domaine de la micro-assurance afin de soutenir la capacité d’entreprendre des personnes en difficulté. Pour cela, il s’est entouré d’acteurs importants, sensibles à la défense de la capacité d’entreprendre des plus fragiles. Outre April, CFDP Assurances, la CNP Assurances, Evolem, la Banque Postale, AG2R La Mondiale, la Matmut et la Caisse des Dépôts ont répondu présents. Ses membres fondateurs contribuent aux actions de la fondation de trois manières:
- Par la constitution, à la dotation initiale de la fondation de 6 millions d’euros dont les revenus servent à financer le fonctionnement de la Fondation;
- Par un appui technique en assurance et en portage des risques;
- Par un mécénat financier et de compétences, avec notamment la participation de leurs salariés aux actions de sensibilisation sur le territoire national.
Ne pourrait-on pas penser que l’action assurantielle de la Fondation renforce en quelque sorte, une situation d’ « assistanat » ? La réponse est non. Les entrepreneurs signataires d’un contrat d’assurance sont obligatoirement accompagnés par l’un des réseaux d’aide à la création partenaires d’Entrepreneurs de la Cité (Adie, Initiative France, France Active, Force Femmes tec…) et ils sont soutenus pour une durée de quatre ans à l’issue de laquelle ils ont vocation à rejoindre le marché classique de l’assurance. Soulignons aussi qu’un partenariat mis en place avec l’Agefiph permet au créateur en situation de handicap de bénéficier gratuitement de la micro-assurance pendant deux ans.
Entrepreneurs de la Cité en chiffres
9 051 entrepreneurs assurés depuis 2007
942 nouveaux adhérents en 2022 (soit 27 % de plus qu’en 2021) dont 52 % de femmes et 78 % de travailleurs handicapés et un âge moyen de 47 ans.
Claire Benisti, Déléguée générale de la Fondation Entrepreneurs de la Citée, pionnière de la micro-assurance en France
En 2022, 61 % des entreprises créées l’ont été sous le régime de la micro-entreprise. Un statut qui séduit toujours plus d’entrepreneurs (plus de 600 000 en 2022 selon l’INSEE) mais ne doit pas pour autant occulter les défis qu’engendrent un tel projet dans un contexte socio-économique profondément dégradé.
Que proposez-vous ?
Nous proposons de solutions permettant aux entrepreneurs d’assurer leur responsabilité civile professionnelle (18 % des contrats souscrits), leur garantie décennale (8 %), leur local, leur matériel et leur stock (61 %), leur complémentaire santé (34 %) et leur prévoyance en cas de maladie (32 %).
Nous proposons également des services gratuits : une expertise gratuite du local commercial avant signature du bail, une permanence juridique et un service de protection juridique. En 2022, nous avons réalisé une centaine de formations et de webinaires pour un total de 1465 créateurs formés aux risques de l’entreprise avec plusieurs modules dont les risques cyber, la responsabilité civile, la protection sociale et la protection juridique. Nous avons également réalisé 38 interventions auprès des réseaux d’accompagnement à la création d’entreprise pour 150 créateurs rencontrés.
Laurent des Brest, Président de CFDP et Président de la Fondation Entrepreneurs de la Cité
Forts de nos 15 ans d’engagement, nous sommes fiers de contribuer à valoriser une économie toujours plus inclusive, en mobilisant le monde de l’assurance au service d’un projet universel et utile socialement. Notre raison d’être est la pérennisation des entreprises en création.
Comment mesurez-vous votre action ?
Notre boussole est le taux de survie des entreprises sinistrées assurées par Entrepreneurs de la Cité. En 2022 ce taux s’élevait à 87 %, soit 2 points de plus qu’en 2021. Ce résultat conforte notre rôle de filet de sécurité pour les entrepreneurs vulnérables qui trouvent dans notre offre de services des outils de résilience, de rebond en cas d’accident ou de sinistre. Et pour aller plus loin, nous avons créé il y a 12 ans un fonds de solidarité qui permet de pallier, à titre exceptionnel, la non-indemnisation de certains sinistres n’ayant pas pu être pris en charge par l’assureur. En 2022, ce fonds de solidarité a bénéficié à huit entrepreneurs pour une enveloppe globale de 9 600 €.
Marc Nabeth, Directeur digital et innovation chez Valmen Consulting, auteur de L’assurance inclusive (Éditions Argus de l’assurance, 2021)
Dans votre livre, vous faites le constat que dans les pays riches et dans les pays émergents ou moins avancés, il y a tous ceux qui sont laissés de coté, et ils sont nombreux, avec un accroissement des inégalités, une moindre confiance dans l’action des pouvoirs publics et des « élites » économiques et financières. L’assurance inclusive est-elle une réponse à cette situation ?
Tout comme la protection sociale, l’assurance inclusive est un amortisseur de crise. Son utilité dépasse la notion de pauvreté au sens strict en ciblant ceux qui sont exclus du marché de l’assurance, des circuits bancaires et financiers classiques. Elle permet de prévenir le glissement vers la pauvreté des personnes vulnérables.
Que doit proposer l’assurance inclusive pour être efficace ?
Elle doit s’appuyer sur des acteurs de terrain, instaurer une relation de confiance grâce à une connaissance socioculturelle plus fine des populations à couvrir, leur offrir des offres adaptées, s’appuyer sur des procédures simples et efficaces. En résumé, l’assurance inclusive, c’est la mise en mouvement du lien social et de vraies rencontres.