Les Français, ces incompris : Haro sur les idées reçues !
Que de questions ce mardi 11 avril lors du Lab OCIRP Autonomie qui recevait Arnaud Zegierman et Adrien Broche, sociologues et sondeurs de l’Institut ViaVoice pour disséquer l’ouvrage de Thierry Keller, Blaise Mao et Arnaud Zegierman, Les Français , ces incompris (Editions de l’Aube avec la Fondation Jean-Jaurès, 2023). Incompris ? Alors comprenons-nous bien….
Par Patrick Lelong
Les Français, incompris ? Mais dans quels domaines et de quelles façons ? En particulier dans leur rapport au travail.
Les Français travaillent trop ? Pas assez ? Malheureux dans leur entreprise ? Non. Selon l’ouvrage, seulement 36% de nos concitoyens arrêteraient de travailler s’ils n’avaient pas besoin d’argent. De plus, les Français se déclarent majoritairement satisfaits (74%) et heureux dans leur travail (68%). Et, de quoi remettre en cause ce que l’on entend ici et là au détour de conversations de comptoir, ce sont surtout les jeunes (81% chez les moins de 30 ans) qui affirment leur satisfaction.
Il faut admettre qu’ils ne sont pas majoritairement malheureux au travail. Mais d’où viennent les différences d’appréciation ? De deux attitudes. « Certains ont une conception « houellebecquienne » du travail – la souffrance et la solitude – et d’autres la conception « France3 », chaleureuse, celle de l’entreprise terreau/terroir », explique Arnaud Zegierman. En revanche, nous dit Adrien Broche « ils manquent de reconnaissance, un trait qui revient toujours dès que l’on évoque le management à la française ». Se plaindre est une habitude pour beaucoup de nos concitoyens, presqu’une posture – attention, ceci est peut -être une idée reçue. Mais tout n’est pas parfait, puisque pour 35% des Français, le travail génère de la souffrance alors que 47% nous disent qu’il leur apporte de la reconnaissance.
La protection sociale réunit les Français
La crise de la Covid a montré à quel point les rapports entre collègues contribuent au bien-être dans et hors de l’entreprise. Par exemple, contrairement à d’autres pays, en France, les déjeuners sont un moment où l’on échange et où l’on travaille aussi. Le bien-être dans l’entreprise demeure un critère essentiel d’appréciation de ce que l’on fait et pourquoi on le fait. 45% des personnes interrogées ont le sentiment que là où ils travaillent aujourd’hui, les intérêts des dirigeants et ceux des salariés vont dans le même sens. Mais 46% ont l’impression inverse : la France est un pays complexe et contrasté. Les Français le reconnaissent quand on leur demande quels traits de caractères leur correspondent le mieux. Ils se disent d’abord « solidaires » (79%), « engagés » (64%), plutôt que « méfiants » (58%) ou « révoltés » (42%). Alors, qu’est ce qui réunit les Français ? La religion ? La couleur de peau ? Notre passé ? Non, plutôt notre avenir. Nous nous définissons par le partage valeurs communes présentes et à venir comme la protection sociale. Et les auteurs de conclure : « On se rend compte alors que les Français ne sont pas du tout ce que l’on croit ».